samedi 20 décembre 2008

Noël et Navidad

La magie de Noël est arrivée en Espagne, et ici à Madrid, comme partout ailleurs, Noël c'est sacré. Mais bien que Noël soit une fête chrétienne et païenne (les hasards des desseins du Seigneur ont fait que le petit jésus est né juste au solstice d’hiver), dans notre société actuelle, c’est aussi une fête bien matérielle.

Malheureusement pour le commerce, cette année sera moins faste que les autres, crise oblige. En témoigne les allées désespérément vides des grands magasins. Mais le plus terrible des effets de la crise (de mon humble point de vue), c’est que les entreprises ont supprimé les paniers de Noël (las Cestas de Navidad), offerts à tous les employés, et qui faisaient la joie des petits et grands, de par leur contenu calorique et alcoolique (un panier contient en général des conserves diverses, des chocolats et du turón, de la charcuterie, du jambon, du vin, du whisky et d'autres trucs qui s'accumulent dans les armoires. Bref, cette année pas de panier et je gage que même quand reviendront des temps plus prospères, les mêmes entreprises oublieront de nous rendre les paniers. Quelle tristesse! Encore heureux qu’on a eu le repas de Noël.

Heureusement, la crise n’a pas empêché de respecter la tradition madrilène. A l'approche de Noël, El Corte Inglés (Le Corte Inglés, c'est un peu comme l'INNO sauf qu'il y en a partout) monte ce qu'ils appellent Cortylandia, une sorte de décoration de Noël géante, avec des nains qui bougent, des fées qui volent et pleins de trucs qui n'ont rien à voir. Et chaque année, depuis des lustres, les parents viennent montrer à leurs enfants, à proximité de la Porte du Soleil, la magie de notre belle société de consommation. Pour une raison qui m'est inconnue, c'est toujours blindé de monde alors que ça ne casse pas vraiment des briques. Évidemment, si vous entrez dans le magasin via la façade de Cortylandia, vous arrivez directement à l'étage "jouets"

Les traditionnelles guirlandes, par contre, ont un peu souffert de la crise. Dans notre belle capitale castillane surendettée, il a fallu rester les pieds sur terre, les illuminations de Noël sont les mêmes que l'année passée, même si notre bon bourgmestre a eu la bonne idée de changer les différentes guirlandes de rue pour qu'on n'aie pas l'impression que ce soient les mêmes (avant on renouvelait chaque années les guirlandes, en en confiant le design à de grands artistes).

Par contre, ce qui ne change pas malgré la crise, c'est la passion des gens pour faire la file. Vous pouvez même voir des gens faire la file une heure pour voir une exposition de crèches, ce qui ne cesse de me surprendre.

Parce qu'ici on considère toujours le Père Noël comme un intru issu du système capitaliste américain, ce qui compte c'est le petit Jésus, le boeuf, l'âne et Marie. Et des crèches, il y en a partout, dans la rue, dans les bâtiments de la commune, dans tous les centres commerciaux, dans les concours de la plus belle crèche, et tout ça. 

On fait aussi et surtout la file pour la Loterie de Noël, la fameuse et traditionnelle Loterie de Noël. 

Le principe est simple, vous achetez (20 Euros) un "Décimo" qui est la dixième partie d'un numéro (Ce qui fait que les lots sont répartis sur 10 tickets). Le gros lot étant de 3M€. Les numéros gagnants sont tirés par les mains innocentes de petits enfants orphelins de l'orphelinat San Idelfonso, tirage retransmis en direct live le matin du 22 décembre.

Ça a pas l'air comme ça mais ça rigole pas, les gens achètent des décimos via leur entreprise (chaque entreprise achète des décimos et réparti les gains entre les employés), via le bar du coin, avec leur copain/fiancé/mari/femme/amant, avec leurs parents, ... Vous donnez alors aux gens que vous appréciez des participations officielles, sorte de papiers signés par la personne ou l’organisme qui la donne, qui sont des parties de décimo, et ce afin de partager avec eux vos gains le cas échéant. La participation reprend le numéro du Décimo que vous avez acheté ainsi que la quantité d’argent qu’il représente (2, 4 ou 6 euros des 20 que coûtent les décimos).


Ce système permet à tout le monde d'augmenter les chances de succès en diminuant d'autant les gains possibles (puisque tout le monde partage). En gros, les gens en arrivent à dépenser 100, 200 ou 300 euros en loterie chaque année. Et je peux assurer qu’on me regarde bizarre quand je n’en achète pas au niveau de l’entreprise. Ils sont comme enfiévrés ici avec cette histoire. 

Vous pouvez voir ici (vers 1:20 minutes), le tirage du gros lot:




Enfin, ici comme ailleurs tout ça reste une grande fête de famille pendant laquelle on ressort les meilleures bouteilles pour fêter ça. En témoigne la bouteille de Pacharan du grand-père d’Esther.

Elle a eu le temps de mûrir, son étiquette date de l’époque franquiste (avec les aigles correspondantes), d’avant 1975.